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Pour que s’épanouisse la danse intégrée

Retour sur la soirée de présentation des 4 projets de recherche

8 juin 2017, MC Frontenac

 

Depuis octobre 2016, quatre ateliers de recherche et création se sont succédés, avec leurs enjeux spécifiques, leurs visions singulières, leurs défis radicalement différents d’un univers chorégraphique à un autre. Deux représentations publiques ont eu lieu, à la Maison de la culture du Plateau puis à la Maison de la culture Frontenac, partenaires généreux de ce projet inédit et formidablement enthousiasmant, qui a su entraîner une équipe soudée et complice qui a uni ses compétences pour ouvrir la danse intégrée au plus grand nombre.

La danse intégrée en est arrivée à un stade où son enjeu principal est d’être enfin reconnue comme une branche de la danse contemporaine sans compromis ni complaisance. Loin de toute forme de voyeurisme apitoyé, d’émotions déferlantes et non analysées, d’étonnements clairs obscurs, la danse intégrée s'est épanouie.

Après la présentation des quatre projets Quadriptyque en continu, devant une salle agréablement pleine en ce 8 juin 2017, c’est très exactement ce que je me suis dit : la danse intégrée n’a plus besoin d’être une spécificité réservée à quelques chorégraphes audacieux et marginaux. Tout chorégraphe de danse contemporaine doit désormais savoir qu’il peut utiliser et intégrer les danseurs avec handicaps divers comme un instrument à part entière de son univers chorégraphique, car les danseurs avec handicaps s’adaptent à tout univers chorégraphique. À la danse contemporaine de s’adapter alors à eux.

Intégrer ne veut plus dire tolérer, ni même singulariser, mais accepter pleinement, comme un élément créatif et créateur. Contrairement aux idées reçues, la création n’existe pas sans contraintes. Les créateurs savent bien cela. Les contraintes imposées ou rencontrées en chemin constituent le terreau le plus fécond de toute forme de création. En ce sens précisément, le handicap en danse représente pour le chorégraphe une opportunité féconde, une occasion de déployer son vocabulaire, de faire évoluer son univers.

Cette réflexion s’est imposée à moi en regardant le spectacle offert par la mise en continuité cohérente et harmonieuse des extraits des pièces de groupe de Deborah Dunn (Casablanca avec France Geoffroy, Maxime D. Pomerleau, Joannie Douville, Georges-Nicolas Tremblay et Thomas Casey) et de Sarah-Ève Grant (Souvent je pense à la fin du monde, avec Roya Hosini, Maxime D. Pomerleau et Joannie Douville), puis des duos intimistes, chacun à sa façon, de Lucie Grégoire (avec Marie-Hélène Bellavance et Georges-Nicolas Tremblay) et de Benoît Lachambre (avec France Geoffroy et Benoît Lachambre). C’est toute l’audace, l’intuition et l’expérience de France Geoffroy qui lui ont permis de penser cette aventure et de choisir des chorégraphes tellement différents.

Aucun d’eux n’avait d’expérience en danse intégrée mais chacun d’eux a répondu avec disponibilité, curiosité et enthousiasme. Connaissant ces quatre chorégraphes dont j’ai vu les œuvres depuis longtemps, j’ai immédiatement et pleinement reconnu leur vocabulaire et leur vision, leur signature unique, par-delà le fait qu’ils s’étaient adaptés à des danseurs avec handicap et sans handicap, et que ceux-ci s’étaient pleinement adaptés à eux. La danse intégrée n’a pas réduit, détourné ou dénaturé leur univers et leur cheminement créatif, elle l’a au contraire confirmé. Et étendu.